Écrit par Me Sébastien Fiset , LL.B., B.A.A. |
Mercredi, 18 Août 2010 16:49 |
CONDO – CE QUE VOUS DEVEZ SAVOIR AVANT D’ACHETER
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La copropriété occupe une place de plus en plus importante dans l’environnement québécois.
Deux chapitres complets de la loi (Code civil du Québec) y sont même destinés afin de régir les rapports de droit privé entre les individus.[1]
Il existe deux (2) types de copropriété : la copropriété divise et la copropriété indivise. Ces types de copropriété peuvent également être formées par phases (verticale et horizontale).
En copropriété divise, vous êtes propriétaire d’une fraction de copropriété comportant une à plusieurs parties privatives et une quote-part indivise dans les parties communes qui sont gérées par un « syndicat » (personne morale) dont vous partagez les coûts de gestion avec les autres copropriétaires selon la valeur relative de votre fraction.
En indivision, vous êtes propriétaire d’une part de toute la propriété, vous gérez le bien en commun et partagez les coûts selon votre part de l’ensemble de l’immeuble.
La vie en copropriété divise est régie par la déclaration de copropriété alors que celle en indivision l’est par une convention d’indivision.
La déclaration de copropriété et la convention d’indivision étant des documents assez volumineux et rédigés dans un jargon juridique, l’aide d’un professionnel exerçant une pratique spécialisée en droit de la copropriété est des plus utiles pour la comprendre et en saisir les nuances avant l’achat.
Le déclaration de copropriété n’étant d’ailleurs pas un contrat de gré à gré avec possibilité de négociation des clauses entre les parties, il est primordial que vous compreniez exactement ce qui y est prévu avant l’achat afin de vous éviter des surprises.
Le Règlement d’Immeuble
On retrouvera assurément plus de restrictions en copropriété qu’en logement locatif. En effet, la vie en copropriété est établie et régie par de multiples règles, restrictions et interdictions.
Il peut être interdit de :
– posséder certaines types d’animaux;
– d’utiliser un barbecue;
– De poser un certain type de mobilier sur le balcon;
– d’installer une antenne parabolique;
– d’utiliser un tapis-roulant;
– de changer le type de revêtement de sol;
– les places de stationnements ou les casiers de rangement peuvent également être limitées et faire l’objet de règlementations précises.
Il est donc judicieux de vérifier au préalable ce qui aura été consigné à la déclaration de copropriété ou à l’acte d’indivision. De plus, il se peut également que d’autres règlements auront été adoptés subséquemment à la publication de la déclaration de copropriété ou l’acte d’indivision. Ceux-ci seront consignés dans le registre de la copropriété et auront autant force de loi. Vous devez donc également vous assurer d’en prendre préalablement connaissance.
La Situation Financière de la Copropriété
De plus, il serait très sage de s’informer sur l’historique du bâtiment, de l’état des revenus et dépenses de la copropriété, du carnet d’entretien et du fonds de prévoyance. Ces informations sont aussi rapportées au registre de la copropriété.
Il est également important de connaître les coûts des frais mensuels, si des cotisations spéciales ont déjà été exigées et les raisons (charges communes insuffisantes ou réparations majeures à effectuer et fonds de prévoyance insuffisant), et si d’autres sont à prévoir dans un avenir rapproché. La lecture des procès-verbaux des assemblées vous informeront si un budget prévisionnel a été préparé à cet effet. Ceux-ci sont également déposés au registre de la copropriété.
Qualité de la Construction
Par exemple, il serait prudent de poser des questions sur la qualité d’insonorisation dans l’immeuble car vivre en condominium c’est comme vivre dans un édifice à appartements, vos voisins sont juste à côté ! C’est pourquoi, il est bon de vérifier si la qualité de : l’insonorisation répond à vos attentes. Si votre vendeur vous fait des représentations, elles lui seront alors opposables.
Constructions Existantes :
Lorsque vous avez arrêté votre choix sur une copropriété déjà existante et que vous êtes à signer votre promesse d’achat, prévoyez qu’elle soit conditionnelle à l’obtention des renseignements suivants du vendeur de la part du syndicat, par l’entremise de votre professionnel (avocat ou notaire) avant de conclure votre achat :
– la déclaration de copropriété et ses amendements (le cas échéant);
– les règlements consignés au registre de la copropriété et adoptés après la publication de la déclaration de copropriété ou de l’acte d’indivision;
– les états financiers des cinq (5) dernières années (bilan et états des résultats), avis de cotisation, l’état des fonds de prévoyance;
– le certificat d’assurance de l’immeuble (assurez-vous que les assurances de l’immeuble couvrent tant les parties communes que les parties privatives, sauf les améliorations faites par les propriétaires à leur unité respective ainsi que la responsabilité civile des administrateurs. Vérifiez également le nombre de réclamations faites à l’assureur) et rapport d’évaluation;
– la liste des travaux majeurs prévus pour les 3 à 5 prochaines années (soumissions et budgets prévisionnels);
– le carnet d’entretien;
– le certificat de localisation récent (moins de cinq (5) ans);
– les procès-verbaux des assemblées des cinq (5) dernières années;
– la nature et l’état des poursuites judiciaires (demandez copies des procédures);
– l’état de compte à jour pour votre unité (Y a-t-il des frais impayés par votre vendeur? Vous pourriez en être responsable après la vente?).
Après réception de ces documents, lisez-les ! Cela peut paraître étrange mais, alors que plusieurs copropriétaires les demandent, peu les lisent. Or, ces documents vous sont opposables s’ils vous sont remis.
Les actions suivantes seraient également à poser avant de conclure votre achat :
– vérifier l’application de la déclaration de copropriété par le syndicat en faisant le tour de la copropriété (certains copropriétaires dérogent-ils au règlement d’immeuble ? Tout laxisme découvert pourrait, avec raison, faire naître des doutes sur le sérieux de l’administration);
– faites la visite de la copropriété, en soirée, à l’heure de pointe et en fin de semaine pour constater les bruits ambiants;
– vérifier si le syndicat est immatriculé auprès du Registraire des entreprises et si toutes les déclarations annuelles ont été produites et à temps;
– distinguer les parties communes des parties communes à usage restreint et les droits que vous y détenez. Vérifiez l’état des parties communes à usage restreint et faites vérifier vos obligations financières par un professionnel en cas de réparations majeures ou remplacement de celles-ci;
– procéder à l’inspection du bâtiment, pas seulement de votre unité, par un professionnel reconnu;
– vérifier quelle est la politique de la copropriété (frais d’administration, dépôt exigé, utilisation de l’ascenseur, etc.) en prévision de votre emménagement et des rénovations que vous envisagez peut-être d’effectuer;
– se renseigner auprès d’un professionnel du droit si des procédures judiciaires ont été intentées contre le syndicat ou par lui;
– vérifier si le vendeur a effectué des travaux pouvant avoir affectés des parties communes ou d’autres copropriétaires (planchers, tuyauteries, plomberie, air climatisé). Le cas échéant, vérifiez s’il a obtenu par écrit les autorisations requises du syndicat.
Nouvelles Constructions :
Lors de la construction d’une nouvelle copropriété, c’est aux soins du promoteur de gérer la copropriété pendant la vente des unités. Celui-ci passe ensuite le flambeau au nouveau conseil d’administration du syndicat (ou au gérant de l’association selon le cas).
Pour les copropriétés divises, le Code civil du Québec fixe un délai. La remise de la gestion doit se faire dans les 90 jours du moment où le promoteur ne détiendra plus la majorité des voix à l’assemblée (art. 1104 C.C.Q.). Ce changement de contrôle peut apporter des désagréments et demander un temps d’adaptation et d’ajustement. Les frais de condos peuvent devoir augmenter si les prévisions du promoteur n’ont pas été réalistes. En effet, trop souvent les promoteurs, pour promouvoir leurs ventes, élaborent un budget d’opération minimal prévoyant des contributions trop basses pour subvenir à tous les besoins du syndicat.
En copropriété divise ou indivise, lors de la mise en vente d’une nouvelle construction comportant au moins dix (10) unités, il doit être remis aux promettant-acheteurs une « note d’information » lors de la signature du contrat préliminaire.[2] Aux termes des articles 1788 et 1789 du Code civil du Québec, cette « note d’information » indique qui sont les architectes, constructeurs et promoteurs dudit projet immobilier, renferme un plan d’ensemble (également plan des stationnements, cases de rangement), le sommaire d’un devis descriptif, un budget prévisionnel, l’indication des installations communes (demandez à obtenir une liste précise des services qui seront disponibles), les renseignements sur la gérance de l’immeuble, l’indication du nombre maximum de fractions destinées à des fins locatives, une copie ou un résumé de la déclaration de copropriété (incluant Règlement d’immeuble) même si encore à l’état d’ébauche.
Renseignez-vous également sur les constructions avoisinantes et si d’autres sont projetées. Elles peuvent avoir un impact sur la vue à laquelle donne actuellement votre unité.
Souvent lors de l’achat d’une construction neuve, le promoteur collabore avec un seul notaire pour toutes ses unités. Il s’avère souvent qu’il s’agit de celui qui a rédigé ou rédigera la déclaration de copropriété ou l’acte d’indivision. L’avantage est qu’il connait mieux que quiconque la copropriété que vous convoitez. Cependant, rien ne vous oblige à utiliser ses services si vous avez déjà votre notaire. Il est coutume que l’acquéreur, s’il paie le prix de vente total, peut choisir son notaire. Les parties cependant peuvent très bien convenir autrement. Par ailleurs, soyez prudent si vous avez arrêté votre choix sur un autre notaire, puisque lors de signature de contrat ou d’avant-contrat, il est très souvent prévu par le promoteur une clause à l’effet vous devrez utiliser les services du notaire choisi par celui-ci.
En plus de requérir les documents prévus aux termes des articles 1787 à 1789 du Code civil du Québec dans la mesure où ils sont disponibles ou applicables, il vous serait utile de :
- bien vous renseigner, dès la signature, sur la garantie des bâtiments neufs (si vous acquérez une unité nouvellement construite). Demandez conseil à un professionnel du droit;
- vérifier les renseignements sur le promoteur (est-il enregistré auprès du plan de garantie applicable à l’immeuble de Régie de Bâtiment du Québec la RBQ ?). L’entreprise existe-elle depuis longtemps ?;
- vérifier si le syndicat a procédé à l’inspection du bâtiment (réception des parties communes) à la fin des travaux, si des malfaçons ont été relevées et les actions que le syndicat a entreprises à cet égard);
- avant la réception de votre unité par le promoteur, procéder à l’inspection par un professionnel reconnu. Remettez copie du rapport au promoteur lors de la visite, puis par courrier recommandé, à ses bureaux et à l’organisme du plan de garantie (ACQ, APCHQ, Maîtres bâtisseurs, etc.) de votre immeuble.
Plus vous serez informés, plus l’achat et la prise de possession de votre logement en copropriété s’avéreront une réussite.
Bon achat !
L’information fournie sur cette page est de nature générale et ne saurait pallier le besoin d’obtenir des conseils juridiques propres à une situation particulière.
[1] Livre quatrième, titre troisième, chapitre deuxième (articles 1012 à 1037 et chapitre troisième (articles 1039 à 1109) du Code civil du Québec.
[2] Article 1787 du Code civil du Québec.
Mise à jour le Samedi, 16 Août 2014 17:29