Plusieurs déclarations de copropriété, en grande majorité publiées antérieurement à l’entrée en vigueur le 1er janvier 1994 du Code civil du Québec (« CCQ »), comportent des clauses qui ne sont plus valides en droit.
Nous en étudions ci-après quelques exemples prenants.
D’abord, pour les copropriétés établies antérieurement au 1er janvier 1994, les décisions en nombre de copropriétaires et en pourcentage de voix ont, pour plusieurs, été modifiées, sauf pour l’exception de l’unanimité en cas de modification à la destination de l’immeuble1 et pour les décisions prises à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée, lesquelles sont demeurées les mêmes. Pour les autres, selon les termes de l’article 1101 CCQ :
Est réputée non écrite toute stipulation de la déclaration de copropriété qui modifie le nombre de voix requis pour prendre une décision prévue par le présent chapitre.
En outre, certaines déclarations de copropriété précédentes au CCQ demandent des copropriétaires d’approuver, en as- semblée, les budgets de l’administration de la copropriété. Or, depuis 1994, date d’entrée en vigueur du CCQ, l’article 1072 CCQ, qui est d’ordre public, prévoit qu’il relève de l’organe décisionnel du conseil d’administration de fixer les budgets, ne permettant désormais qu’une consultation de l’assemblée des copropriétaires:
Annuellement, le conseil d’administration fixe, après consultation de l’assemblée des copropriétaires, la contribution de ceux- ci aux charges communes, après avoir déterminé les sommes nécessaires pour faire face aux charges découlant de la copropriété et de l’exploitation de l’immeuble et les sommes à verser au fonds de prévoyance.
La contribution des copropriétaires au fonds de prévoyance est d’au moins 5% de leur contribution aux charges communes. Il peut être tenu compte, pour l’établir, des droits respectifs des copropriétaires sur les parties communes à usage restreint.
Le syndicat avise, sans délai, chaque copropriétaire du montant de ses contributions et de la date où elles sont exigibles.
Certaines déclarations de copropriété prévoient également que des copropriétaires, s’ils représentent 1⁄4 (25 %) des voix, peuvent par exemple requérir de leur syndicat la convocation d’une assemblée annuelle ou extraordinaire, en précisant les questions qui devront être traitées. En revanche, selon Loi sur l’application de la réforme du code civil, la copropriété divise établie avant l’entrée en vigueur du Code civil du Québec est désormais régie par celui-ci. D’une part, suivant l’article 352 CCQ, les copropriétaires représentant 10 % des voix peuvent requérir la tenue d’une assemblée. D’autre part, selon 334 (2) CCQ, il est permis par règlement d’immeuble de déroger aux règles établies pour le fonctionnement des personnes morales, à la condition que les droits des membres soient préservés. Or, requérir un pourcentage supérieur à 10 % des voix pour requérir des administrateurs ou du secrétaire la convocation d’une assemblée ne préserve pas les droits des membres, mais au contraire pour incidence de les alourdir. Ainsi, tout pourcentage à une déclaration de copropriété imposant la signature de copropriétaires au-delà de 10 % des valeurs relatives des fractions est inopérant depuis 19943.
Plus récemment, depuis le 10 janvier 2020, certaines décisions soumises à l’assemblée des copropriétaires ont égale- ment fait l’objet d’assouplissements. En effet, l’article 1097 CCQ se lit désormais comme suit :
Sont prises par des copropriétaires, représentant les trois quarts des voix des copropriétaires, présents ou représentés, les décisions qui concernent :
- Les actes d’acquisition ou d’aliénation immobilière par le syndicat;
- Les travaux de transformation, d’agrandissement ou d’amélioration des parties communes, ainsi que la répartition du coût de ces travaux et la constitution d’une hypothèque mobilière pour les financer;
- La construction de bâtiments pour créer de nouvelles fractions;
- La modification de l’acte constitutif de copropriété ou de l’état descriptif des fractions;
- La modification de la description des parties privatives visée à l’article 1070.
Cet article 1097 CCQ requérait auparavant et depuis le 1er janvier 1994, l’assentiment d’une majorité (50 % + 1 voix) de tous les copropriétaires, représentant 75 % des voix de tous les copropriétaires.
Des précisions de nature déclarative (qui ne change pas l’état du droit) ont également été apportées afin de clarifier le nombre de voix requises pour modifier le règlement de l’immeuble (1096 CCQ) :
Les décisions du syndicat sont prises à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée, y compris celles visant à modifier le règlement de l’immeuble ou à corriger une erreur matérielle dans la déclaration de copropriété.
Le législateur est aussi venu préciser que les modifications au règlement d’immeuble ne peuvent se faire de façon tacite et qu’il est désormais requis que cela se fasse par écrit [1060 (1) CCQ] :
1060. La déclaration, ainsi que les modifications apportées à l’acte constitutif de copropriété et à l’état descriptif des fractions, sont présentées au bureau de la publicité des droits. La déclaration est inscrite au registre foncier, sous les numéros d’immatriculation des parties communes et des parties privatives; les modifications ne sont inscrites que sous le numéro d’immatriculation des parties communes, à moins qu’elles ne touchent directement une partie privative. Quant aux modifications apportées au règlement de l’immeuble, elles doivent l’être de manière expresse, dans un procès-verbal ou une résolution écrite des copropriétaires, et il suffit qu’elles soient déposées au registre tenu par le syndicat conformément à l’article 1070.
De même, l’article 1102 CCQ a fait l’objet d’un retrait (usage qu’un copropriétaire peut faire de sa partie privative), pour se lire à l’avenir comme suit :
Est sans effet toute décision du syndicat qui, à l’encontre de la déclaration de copropriété, impose au copropriétaire une modification à la valeur relative de sa fraction ou à la destination de sa partie privative.
Enfin, un autre exemple notable constitue les clauses pénales contenues au sein d’une déclaration de copropriété. Alors qu’avant l’entrée en vigueur le 10 janvier 2020 de la Loi 16 les clauses pénales étaient fréquemment intégrées au règlement de l’immeuble par une décision de la majorité absolue (50 % + 1) des voix des copropriétaires présents ou représentés lors de l’assemblée des copropriétaires, ces dernières doivent pour l’avenir obligatoirement être intégrées à l’acte constitutif de copropriété, lequel ne peut être qu’amendé par une décision prise par des copropriétaires représentant les trois quarts (75 %) des voix des copropriétaires présents ou représentés. Comme mesure transitoire, le législateur a indiqué que les clauses pénales existantes avant l’entrée en vigueur de la Loi 16 sont réputées faire partie intégrante de l’acte constitutif.
Il ne s’agit que de quelques exemples tirés du quotidien du praticien exerçant en droit de la copropriété divise.
Les clauses des déclarations de copropriété nécessitent une étude minutieuse pour déterminer si elles demeurent valides ou si elles sont devenues inopérantes, si elles ont été remplacées ou devenues sans effet. Les déclarations de copropriété ayant un certain âge, particulièrement celles datant d’avant 1994, comportent régulièrement des clauses devenues inopérantes qui ne font qu’induire en erreur la collectivité des copropriétaires. Une refonte de la déclaration de copropriété permet le retrait de ces clauses obsolètes et l’ajout de clauses plus actuelles et modernes pour permettre les installations des véhicules électriques, assurer une prévention des sinistres, responsabiliser les copropriétaires par des clauses pénales, régir la décriminalisation du cannabis ou prévoir l’indication d’un taux d’intérêt annuel fixe et précis en cas de montants dus par un copropriétaire.
Cette opération, bien qu’elle soit un projet financièrement non négligeable, s’avère souvent bénéfique à long terme en ce qu’elle permet une meilleure compréhension des devoirs et obligations de chacun, met à jour conformément à l’état du droit les dispositions de ladite déclaration de copropriété, assurant un plus grand agrément face à certains besoins nouveaux, tout en responsabilisant à l’avenir les copropriétaires négligents et délinquants aux dépens de la collectivité. Tout comme il est conséquent de veiller à ce que les travaux nécessaires à la conservation et à l’entretien de l’immeuble soient effectués, il est d’une quiétude de la collectivité des copropriétaires de traiter avec la même attention sa déclaration de copropriété!