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Délai raisonnable de la mise en demeure

Lundi, 06 Octobre 2014 14:22

LE DÉLAI RAISONNABLE DE LA MISE EN DEMEURE – RÉSILIATION DE CONTRAT POUR CAUSE

 

Dans le cadre d’un dossier de résiliation pour cause d’un contrat de service, la Cour d’appel en vient à s’interroger sur le délai reconnu comme étant raisonnable pour mettre le débiteur en demeure de corriger la situation avant que le créancier ne puisse se prévaloir de son droit de résiliation[1].

La Cour rappelle préliminairement les fondements juridiques de la mise en demeure et de la résiliation.

1590. L’obligation confère au créancier le droit d’exiger qu’elle soit exécutée entièrement, correctement et sans retard.

Lors que le débiteur, sans justification, n’exécute pas son obliga- tion et qu’il est en demeure, le créancier peut, sans préjudice de son droit à l’exécution par équivalent de tout ou partie de l’obligation:

1° Forcer l’exécution en nature de l’obligation;

2° Obtenir, si l’obligation est contractuelle, la résolution ou la résiliation du contrat ou la réduction de sa propre obligation corrélative;

3° Prendre tout autre moyen que la loi prévoit pour la mise en oeuvre de son droit à l’exécution de l’obligation.

1604. Le créancier, s’il ne se prévaut pas du droit de forcer, dans les cas qui le permettent, l’exécution en nature de l’obligation contractuelle de son débiteur, a droit à la résolution du contrat, ou à sa résiliation s’il s’agit d’un contrat à exécution successive.

Cependant, il n’y a pas droit, malgré toute stipulation contraire, lorsque le défaut du débiteur est de peu d’importance, à moins que, s’agissant d’une obligation à exécution successive, ce défaut n’ait un caractère répétitif; mais il a droit, alors, à la réduction proportionnelle de son obligation corrélative.

La réduction proportionnelle de l’obligation corrélative s’apprécie en tenant compte de toutes les circonstances appropriées; si elle ne peut avoir lieu, le créancier n’a droit qu’à des dommages-intérêts.

1605. La résolution ou la résiliation du contrat peut avoir lieu sans poursuite judiciaire lorsque le débiteur est en demeure de plein droit d’exécuter son obligation ou qu’il ne l’a pas exécutée dans le délai fixé par la mise en demeure.

1606. Le contrat résolu est réputé n’avoir jamais existé; chacune des parties est, dans ce cas, tenue de restituer à l’autre les prestations qu’elle a reçues.

2125. Le client peut, unilatéralement, résilier le contrat, quoique la réalisa- tion de l’ouvrage ou la prestation du service ait déjà été entreprise.

2129. Le client est tenu, lors de la résiliation du contrat, de payer à l’entrepreneur ou au prestataire de services, en proportion du prix convenu, les frais et dépenses actuelles, la valeur des travaux exécutés avant la fin du contrat ou avant la notification de la résiliation, ainsi que, le cas échéant, la valeur des biens fournis, lorsque ceux-ci peuvent lui être remis et qu’il peut les utiliser.

L’entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, pour sa part, de restituer les avances qu’il a reçues en excédent de ce qu’il a gagné.

Dans l’un et l’autre cas, chacune des parties est aussi tenue de tout autre préjudice que l’autre partie a pu subir.

[…]

Puis, le tribunal finit par rappeler que le délai raisonnable de mise en demeure est une question de fait. Il faut s’attarder à la situation spécifique et à la possibilité pour le débiteur de corriger la situation dans le délai requis :

[73] En premier lieu, je crois important de rappeler que, pour évaluer la suffisance du délai accordé à l’intimée, on ne doit pas se limiter au texte de la lettre datée du 30 mars 2006. Conformément aux enseignements de la jurisprudence, l’ensemble des circonstances doit être pris en considération afin de déterminer le caractère raisonnable du délai accordé par le créancier. Lorsque la situation du débiteur est désespérée, et qu’accorder un délai plus long n’aurait rien changé, le juge peut décider qu’il n’y a pas lieu de sanctionner l’action subite du créancier, c’est-à-dire la soudaineté de la résiliation ou la brièveté du délai accordé; « l’exigence d’une mise en demeure ne doit pas constituer une démarche formaliste permettant au débiteur d’éviter les conséquences de son inexécution ».


[1] Corporation d’Urgences-santé de la région de Montréal métropolitain c. Novacentre Technologie ltée, 2014 QCCA 1594 (CanLII)

 

Mise à jour le Dimanche, 14 Décembre 2014 12:14

Me Sébastien Fiset
Me Sébastien Fiset
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