Qu’est-ce qu’un promoteur immobilier ?
Le promoteur immobilier est “une personne physique ou morale qui réalise, directement ou par l’entremise d’une ou de plusieurs autres, un projet immobilier ». Il s’occupe de la conception du projet, de l’achat du terrain et de son aménagement ainsi que du financement, de l’administration, de la commercialisation, de la construction du projet et des modalités de vente.
Au sens de la copropriété divise, li est également celui qui détient au moins la moitié de l’ensemble des fractions ou ses ayants cause, sauf celui qui acquiert de bonne foi et dans l’intention de l’occuper une fraction pour un prix égal à sa valeur marchande au moment de l’inscription de la déclaration de copropriété, et peut être une personne morale ou physique.
lI est de pratique courante qu’au moment de la publication de la déclaration de copropriété au registre fonciers, un représentant ou un dirigeant du promoteur soit déjà nommé dans le règlement d’immeuble comme administrateur provisoire. Dans son rôle d’administrateur provisoire du syndicat, cette personne est dans l’obligation de respecter les obligations que la loi, l’acte constitutif et les règlements lui imposent en plus d’agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés.
Quelles sont les obligations générales d’un promoteur immobilier en tant qu’administrateur provisoire ?
Les obligations des promoteurs immobiliers en tant qu’administrateur provisoire sont régies par le Code civil du Québec (ci-après «C.c.Q. ») lequel a fait l’objet de précision par la Loi visant principalement l’encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l’amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d’habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal.
- Obligation de prudence de diligence et d’honnêteté et loyauté
La ligne est parfois mince entre les fonctions de promoteur et d’administrateur provisoire. lI est donc important de faire la distinction entre ces rôles. Pourquoi? Pour éviter d’engager sa responsabilité extracontractuelle.
L’administrateur provisoire doit agir avec prudence, diligence, honnêteté et loyauté.
Le représentant du promoteur a l’obligation de transparence dans son administration lors de l’assemblée de transition. lI doit rendre compte de son administration provisoire, produire des états financiers, ainsi qu’un état de dette et créances. C’est pourquoi il est important pour ce dernier de connaître ses obligations et de départager ses investissements financiers des dépenses du syndicat afin d’éviter de se placer dans une situation ou certaines sommes pourront lui être réclamées par après.
- Obligation d’agir dans l’intérêt du syndicat
Le promoteur ne doit pas se placer en situation de conflit d’intérêts.
Les conflits d’intérêts peuvent compromettre l’intégrité des promoteurs immobiliers et nuire aux acheteurs et aux investisseurs. Les promoteurs ont l’obligation de faire preuve de transparence et d’agir dans l’intérêt des parties prenantes, en évitant de se placer en situation de conflit d’intérêts.
En effet, à titre d’administrateur provisoire, le promoteur doit prioriser les intérêts de la personne morale, le syndicat, plutôt que ses intérêts en tant que promoteur. Depuis 2015, l’arrêt Leclerc établit qu’un promoteur agissant comme administrateur provisoire peut se voir trouver personnellement responsable. En effet, le promoteur qui met d’abord ses intérêts de promoteur plutôt que ceux d’administrateur provisoire du syndicat peut être tenu au remboursement de certaines dépenses et/ou profits occasionnés durant sa période d’administration provisoire et ce suivant les règles de responsabilité extracontractuelle.
Le promoteur ne peut pas non plus confondre les biens du syndicat avec les siens ou utiliser à son profit ou au profit de son alter ego les biens du syndicat ou de l’information obtenue dans ses fonctions d’administrateur provisoire à moins d’en avoir l’autorisation du syndicat.
De même, il doit aussi éviter de se placer dans une situation de conflit entre son intérêt personnel et ses obligations en tant qu’administrateurs.
Dès que l’apparence de conflit d’intérêts se manifeste, le promoteur doit dénoncer au syndicat tout intérêt qu’il a dans une entreprise ou une association. Il en va de même pour tout contrat de l’administrateur provisoire avec le syndicat. S’il omet de le faire, le tribunal, à la demande du syndicat ou d’un copropriétaire, peut annuler tout acte ou ordonner à l’administrateur provisoire de rendre compte au syndicat et de lui remettre tout profit réalisé.
- Obligation de délaisser son administration / délais
L’administration provisoire du promoteur prend fin lorsque ce dernier détient moins de 50 % des unités de la copropriété, et par la tenue d’une assemblée extraordinaire des copropriétaires dans les 90 jours. Cette assemblée a pour objet la reddition de compte par l’administrateur provisoire et la nomination d’un nouveau conseil d’administration.
lI est important pour le promoteur de tenir une comptabilité distincte et détaillée dans son administration?. Lors de l’assemblée de transition, il devra présenter les états financiers, lesquels doivent être accompagnés de commentaires d’un comptable. Il doit donc fournir ses preuves de paiement et factures à l’appui des sommes encourues par le syndicat. Or, trop souvent les états financiers sont absents ou incomplets.
Il doit de même rembourser au syndicat les dépenses liées non pas à l’administration, mais au parachèvement du projet immobilier (chauffage, électricité, indemnité en cas de préjudice suite aux travaux demandés par le syndicat).
Après l’assemblée de transition, le promoteur doit aussi re- mettre au syndicat les plans et devis de l’immeuble, les certificats de localisations (lorsque disponible), une description suffisamment détaillée des parties privatives ainsi que les autres documents ou renseignements que le gouvernement pourrait exiger par voie de règlements. Après la sortie d’un règlement du gouvernement prévu pour cette année, il sera obligatoire pour les promoteurs immobiliers de fournir au moment de la livraison du bâtiment une étude du fonds de prévoyance afin d’évaluer les besoins financiers futurs de la copropriété en ce qui concerne l’entretien, les réparations majeures et le remplacement des parties communes.
- Obligation d’un budget réaliste et adéquat du syndicat
Trop souvent les promoteurs présentent des budgets qui ne reflètent pas la réalité ou les réels besoins de la copropriété.
Nous constatons souvent des promotions annonçant de faibles coûts de charges communes ou d’une année gratuite de charges communes, le tout dans le but de mousser la vente des unités. Souvent, les budgets sont révisés par le conseil d’administration après la transition de l’administration et les fonds disponibles sont insuffisants? La copropriété commence dès lors du mauvais pied et les copropriétaires et le syndicat se retrouvent avec un budget déficitaire qu’ils doivent corriger rapidement.
Pourtant, ceci est au désavantage du promoteur. En effet, lorsque les sommes prévues au budget établi par le promoteur pour les exercices financiers pendant lesquels il est administrateur provisoire du syndicat et les sommes réellement engagées par le syndicat comportent une différence de 10% ou plus, le promoteur et/ou l’administrateur provisoire est tenu au remboursement de la différence à moins que cette différence soit attribuable au syndicat après la nomination d’un nouveau conseil d’administration.
- Obligations quant à la note d’information
En plus des obligations liées à la vente et à la construction, le C.c.Q. impose au promoteur la divulgation de toutes les informations pertinentes à un achat éclairé des acheteurs potentiels. En pratique, ceci se traduit par la note d’information?
La note d’information est un document important, sinon le plus important à fournir par le promoteur. En effet, elle complète le contrat préliminaire et doit être remise à l’acheteur d’une fraction de copropriété divise30. Elle contient :
- Les noms des architectes, ingénieurs, constructeurs et promoteurs;
- Un plan de l’ensemble du projet immobilier et, s’il y a lieu, le plan général de développement du projet ainsi que le sommaire d’un devis descriptif;
- Le budget prévisionnel établi sur une base annuelle à compter de l’inscription de la déclaration de copropriété;
- Les installations communes;
- Les renseignements sur la gérance de l’immeuble, ainsi que, s’il y a lieu, sur les droits d’emphytéose et les droits de propriété superficiaire dont l’immeuble fait l’objet;
- S’il y a lieu, le plan de garantie et les modalités visant l’immeuble qui permet au promettant acheteur d’en prendre connaissance;
- Une copie ou un résumé de la déclaration de copropriété ou de la convention d’indivision et du règlement de l’immeuble, même si ces documents sont à l’état débauche;
- Si la vente est en matière de copropriété divise, un état des baux consentit par le promoteur sur les parties privatives ou communes de l’immeuble et le nombre maximum de fractions destinées à des fins locatives.
Si l’acheteur ne reçoit pas de note d’information ou que celle- ci comporte des erreurs ou des lacunes, li peut demander la nullité de la vente et des dommages-intérêts s’il en subit un préjudice sérieux dans les 90 jours de la vente. De plus, il est prévu que le contrat préliminaire, qui comprend la note d’information en matière de copropriété divise, doit contenir une faculté de dédit selon laquelle le promettant acheteur peut se dédire de la vente dans les dix (10) jours de l’acte. Si le promoteur et/ou l’administrateur provisoire du syndicat ne remet pas au promettant acheteur une note d’information complète, le promettant acheteur peut alors réclamer des dommages-intérêts, la nullité de la vente ou se dédire de la vente tant et aussi longtemps qu’il ne reçoit pas cette note d’information ou, à défaut, dans les 10 jours de sa réception?
- Obligation de contribution aux charges communes
Tous les copropriétaires, acheteurs comme promoteur, contribuent aux charges communes en proportion de la valeur relative de leur fraction. Ils contribuent seuls aux charges liées à l’entretien et aux réparations courantes des parties communes à usage restreint, et ce dès la publication de la déclaration de copropriété.
En effet, tant que le promoteur n’a pas encore vendu toutes ses unités, il est tenu au paiement des charges communes de l’immeuble des parties privatives qu’il n’a pas encore vendues, et ce, peu importe, s’il a délaissé son administration provisoire ou s’il les occupe ou non.
Il serait contraire à l’ordre public que le promoteur ne contribue pas aux charges communes de l’immeuble. De plus, tous les frais lors de la construction de l’immeuble ainsi que tous les travaux de parachèvement sont à la charge du pro- moteur. Il est aussi tenu au paiement des frais d’électricité qui y sont liés. Par exemple, dans l’arrêt Gutenberg, le promoteur et son alter ego se sont vu condamner au paiement des frais d’électricité et au remboursement des sommes réclamées en trop au syndicat.
- Exception de contribution pour les parties communes à usage restreint
Il existe néanmoins une exception à la contribution du promoteur aux charges communes. Dans les copropriétés par phases, le promoteur immobilier édicte souvent à la déclaration de copropriété initiale qu’il n’a pas à contribuer aux charges communes de la copropriété relatives à l’usage, l’entretien et aux réparations courantes tant et aussi longtemps que les immeubles des phases concomitantes ne sont pas construits.
Comment? En établissant que, tant et aussi longtemps que les phases ne sont pas bâties, les parties communes sont à l’usage restreint unique des copropriétaires des phases concomitantes dont les immeubles sont érigés. Les parties communes à usage restreint sont des parties qui ne peuvent que servir à l’usage de certains copropriétaires ou d’un seul. Le promoteur se doit de protéger ses dépenses vis-à-vis des charges qui ne sont pas à son bénéfice quant aux phases qu’il détient, mais qui ne sont pas bâties. La logique veut qu’il ne soit pas équitable pour le promoteur de payer des frais, comme les frais de déneigement, pour les phases qui ne sont pas encore construites.
En revanche, cela ne s’applique pas à tout. Le promoteur doit continuer de payer les charges relatives aux droits de propriété, telles celles relatives aux assurances, au gestionnaire, aux frais bancaires et aux honoraires professionnels ou encore à tous services qui ne sont pas en lien avec l’entretien ou à la réparation courante des parties communes à l’usage exclusif des phases existantes.
- Obligations du promoteur immobilier selon la Loi sur / a protection du consommateur
Un promoteur immobilier est tenu aux garanties légales du vendeur 2, mais aussi astreint aux dispositions en matière de protection du consommateur. En effet, aux termes de la Loi sur la protection du consommateur (ci-après «L.p.c. »), le pro- moteur est considéré comme un commerçantes qui vend des unités d’habitation à des consommateurs (les acheteurs).
Les promoteurs doivent donc s’abstenir de toute pratique interdite par représentation fausse ou trompeuse. Une représentation fausse ou trompeuse à l’acheteur constitue une pratique interdite. Elle peut être une affirmation, un comportement ou une omission de la part du promoteur. Par exemple, dans le contrat préliminaire et la note d’information, le promoteur prévoit un ascenseur à usage exclusif, des fenêtres de pleine grandeur, l’utilisation d’un certain matériau (comptoirs en quartz, en marbre, un certain type de plancher, etc.) et lors de la livraison, l’unité ne contient rien de tel.
Dans de tels cas, l’acheteur bénéficie de la présomption de dol par le promoteur immobilier ou de son représentant. La présomption est telle que si l’acheteur avait eu connaissance du véritable état de livraison de l’unité, il n’aurait pas contracté ou aurait contracté à un prix moindre.
Les conséquences juridiques du dol se traduisent par la réduction du prix de vente, la nullité du contrat ou des dommages-intérêts. Le promoteur aura à prouver qu’ayant connu les véritables conditions de l’unité, l’acheteur aurait tout de même contracté. De plus, la Cour suprême du Canada affirme que le critère d’analyse est le consommateur crédule et informés. Il s’agit là d’un fardeau de la preuve élevé.
Lorsque le promoteur procède à la vente de ses unités par le biais de personnes, de compagnies ou d’entreprises liées aussi appelées alter ego, li se doit d’assurer de mettre au clair avec les potentiels acheteurs qui est l’entité investissant et ne pas y faire référence pour mousser la vente. À défaut de le faire, le promoteur pourrait faire face à une demande d’annulation de la vente pour cause de dol. Ceci est pour éviter toute confusion de leur part quant à l’identité du promoteur et de la déclarante (vendeur), car cela pourrait constituer une faute et engager la responsabilité à la fois des investisseurs et de la déclarante.
- Obligations en vertu de la Charte de la langue française et de la Loi 96
Des modifications ont été apportées à plusieurs sections du C.c.Q. dont dans la section sur l’interprétation du contrat. Dorénavant, les contrats préliminaires doivent être en français, sans quoi le contrat est réputé être incompréhensibles.
De plus, lorsque le contrat peut est considéré comme un contrat d’adhésion et qu’il n’est pas rédigé en français à la demande de l’adhérent, ce dernier est présumé ne pas en avoir pris connaissance. De plus, toute clause qui n’est pas rédigée en français est réputée incompréhensible.
Enfin, la déclaration de copropriété et ses actes de modifications sont considérés comme étant des contrats d’adhésion, car elles sont rédigées et imposées par le promoteur à l’acheteur qui lui ne peut pas les négocier ou les refuser.
Elles doivent dorénavant être exclusivement rédigées en français. Non seulement doivent-elles être rédigées en français, mais aussi le registre, les documents tenus à la disposition des copropriétaires, tout document rédigé par le syndicat ainsi que les demandes d’inscription dans les différents registres doivent eux aussi être exclusivement en français. Par conséquent, les procès-verbaux du conseil d’administration de l’administrateur provisoire ainsi que des assemblées de copropriétaires avant de délaisser son administration doivent être en français.
Conclusion
Ce texte démontre que certaines omissions d’un promoteur et/ou d’un administrateur provisoire dans leurs obligations peuvent avoir d’importantes conséquences. Des poursuites judiciaires coûteuses des syndicats de copropriété et des copropriétaires pourraient être évitées. En certains cas, l’administrateur du promoteur peut être tenu responsable promoteur peut être tenu personnellement responsable.
Il est vivement recommandé d’obtenir l’avis d’un avocat ou d’un notaire ayant une pratique spécialisée en droit immobilier afin d’obtenir une analyse approfondie des contrats types utilisés par les promoteurs, car d’importantes conséquences pécuniaires sont en jeu.