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Parties communes à usage restreint : privilège et obligations (révisé)

Écrit par Me Sébastien Fiset , LL.B., B.A.A.
Mardi, 06 Avril 2010 11:51

LES PARTIES COMMUNES A USAGE RESTREINT : PRIVILEGES ET OBLIGATIONS (révisé)

Contacter l’auteur : s.fiset@fisetlegal.com

Une propriété bénéficiant d’un « petit extra » tel un toit-terrasse ou un puits de lumière est considérée comme privilégiée. Mais des obligations y sont également reliées. Voyons lesquelles.

Définition de parties communes à usage restreint

Ce qui différencie la partie commune à usage restreint d’une partie commune que l’on qualifierait d’« ordinaire » ce sont les droits de jouissance.

En effet, si tous les copropriétaires sont propriétaires des parties communes[1], bénéficiant d’une part indivise de celles-ci, il en est autrement des parties communes à usage restreint. Bien qu’elles soient toujours la propriété indivise de tous les copropriétaires, comme l’indique son nom « usage restreint », les parties communes à usage restreint ne servent qu’à l’usage de certains copropriétaires, ou même un seul.

Il n’en demeure pas moins qu’il est de la responsabilité du syndicat de voir à l’entretien et la conservation tant des « parties communes » que des « parties communes à usage restreint » (art. 1039 et 1077 C.c.Q.). Sauf disposition contraire de la déclaration de copropriété, le syndicat procèdera donc à tous les travaux, réparations et entretiens à effectuer.

Cependant, la distinction entre les « parties communes » et les « parties communes à usage restreint » affecte le paiement des charges qui y sont reliées.

Paiement des charges

D’une part, l’ensemble des copropriétaires (par l’entremise du syndicat) a la charge des dépenses destinées aux réparations majeures et remplacements, peu importe le type de parties communes (à usage restreint ou non) auxquelles les fonds seront destinés. Chaque copropriétaire y contribue selon la valeur relative de sa fraction. Ces sommes forment le « fonds de prévoyance ». Par exception, l’article 1072 du Code civil du Québec permet de tenir compte des droits de jouissance exclusifs des copropriétaires sur les parties communes à usage résidentiel pour déterminer leur contribution. Ainsi, nous sommes d’opinion qu’il est possible de percevoir les coûts de réparations majeures et remplacement des seuls copropriétaires qui bénéficient desdites parties communes à usage restreint, à la condition qu’une clause à la déclaration de copropriété le requiert et que le budget du syndicat le prévoit.

D’autre part, les dépenses d’entretien et de réparations mineures afférentes aux parties communes à usage restreint sont à la seule charge des copropriétaires (art. 1064 C.c.Q.). Il incombe au syndicat d’effectuer la répartition des charges communes des parties communes à usage restreint en tenant compte de l’utilisation qui en est faite.

Ainsi, les copropriétaires bénéficiant de l’usage restreint d’un espace de stationnement (qualifié comme tel dans la déclaration de copropriété) sont tenus responsables de défrayer les coûts d’entretien normal et de réparations mineures reliés à celui-ci, comparativement à un copropriétaire du même immeuble ne possédant pas un espace de stationnement. Autre exemple, toute chose étant égale par ailleurs, les copropriétaires bénéficiant de l’usage exclusif de deux balcons ou deux fenêtres, devraient payer deux fois plus pour leur entretien ou réparations mineures à effectuer que celui qui n’en a qu’un seul.

Quant aux parties communes dont tous les copropriétaires bénéficient, et identifiées comme tel dans la déclaration de copropriété ou selon la présomption établie à l’article 1044 du Code civil du Québec (voir note 1), elles seront à considérer dans le budget de dépenses courantes du syndicat. Tous les copropriétaires devront y contribuer selon leur quote-part.

Privilège

Certaines « parties communes à usage restreint » peuvent avoir comme privilège d’être adaptées par son propriétaire qui en a l’usage exclusif, sous réserves des restrictions prévues à la déclaration de copropriété et l’harmonie de l’immeuble.

En effet, les copropriétaires jouissant de l’usage exclusif, par exemple, d’un toit-terrasse, peuvent, sauf disposition contraire de la déclaration de copropriété, y installer des biens meubles ou effectuer de menus ajustements à caractère non permanent (décoration).

Cependant, l’implantation d’un élément permanent tel : spa, verrière, caillebotis, cloison permanente, auvent, antenne satellite, climatiseur et autres éléments matériellement attachés ou réunis à l’immeuble, nécessitent l’accord préalable de l’assemblée des copropriétaires. L’article 1097 du Code civil du Québec requiert une majorité (50%) des copropriétaires représentant 75% des voix de tous les copropriétaires pour tous travaux de transformation, agrandissement ou amélioration des parties communes ou parties communes à usage restreint.

Attention : ce privilège comporte d’autres réserves. Un balcon, par exemple, pourrait être à l’usage exclusif de l’un des copropriétaires mais en modifier l’aspect risquerait de briser l’harmonie d’ensemble de l’immeuble, contrevenant ainsi à la déclaration de copropriété et la destination de l’immeuble.

Bien qu’il puisse être un sujet épineux pour un syndicat de voir à l’application des dispositions émises aux termes de la déclaration de copropriété de l’immeuble, il ne s’agit pas d’un pouvoir mais d’un devoir de les faire respecter.

En cas de doute quant aux droits et obligations en regard d’une copropriété, d’ajouts, modification ou transformation à y apporter, consultez un conseiller juridique ayant une pratique spécialisée en droit de la copropriété.

De même, pour les personnes convoitant l’achat d’une unité d’habitation tenue en copropriété : prenez connaissance à l’avance de la déclaration de copropriété et des règlements de l’immeuble et, en cas de difficulté de compréhension, sollicitez l’aide d’un professionnel.

L’information fournie sur cette page est de nature générale et ne saurait pallier le besoin d’obtenir des conseils juridiques propres à une situation particulière.


[1] Notons que selon l’article 1044 du Code civil du Québec, seront présumés « parties communes » les éléments tels le sol, les cours, balcons, parcs et jardins, les voies d’accès, les escaliers et ascenseurs, les passages et corridors, les locaux des services communs, de stationnement et d’entreposage, les caves, le gros œuvre des bâtiments, les équipements et les appareils communs, tels les systèmes centraux de chauffage et de climatisation et les canalisations, y compris celles qui traversent les parties privatives, s’ils ne sont pas qualifiés autrement dans l’acte constitutif de votre déclaration de copropriété.

Mise à jour le Samedi, 16 Août 2014 17:38

Me Sébastien Fiset
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